Cet article est un digest d’un benchmark portant sur la communication digitale francophone de 11 cabinets de conseil et d’audit analysée par l’agence Profile entre le 17 mars et le 24 avril. Vous pouvez télécharger gratuitement l’intégralité du benchmark en nous contactant ici.
Une crise qui bouleverse la communication des marques
La crise a eu un impact immédiat sur l’activité et la communication des entreprises : 70 % des marques ont baissé ou annulé leurs prises de parole dès le début du confinement, principalement pour des raisons budgétaires*.
Même si toutes les entreprises n’ont pas subi le même impact lors de la crise, elles traversent en général 3 phases principales :
- La phase de sidération : liée au choc brutal de la crise, elle chamboule l’organisation de l’entreprise, son business et sa communication.
- La phase d’acceptation : l’adaptation de l’entreprise au contexte actuel et l’élaboration d’une stratégie de réponse.
- La phase de reconstruction : sortie de crise et redéfinition de la stratégie en fonction des nouvelles donnes introduites par la crise.
Les cabinets de conseil et d’audit ont été confrontés aux mêmes enjeux et difficultés que la majorité des entreprises, notamment en ce qui concerne la baisse d’activité ou la nécessité de maintenir la cohésion en interne. Cependant, par leur rôle d’expertise et de conseil, les cabinets ont dû réagir avec la plus grande célérité pour offrir en ce temps de crise et malgré la distance, un accompagnement fort et personnalisé. Réagir vite, mais de manière pertinente pour offrir du contenu à forte valeur ajoutée.
Quelle communication digitale pour les cabinets de conseil et d’audit ?
À travers l’analyse quantitative et qualitative de l’activité social media de 11 cabinets de conseil et d’audit, l’agence Profile a dressé les grandes tendances de communication digitale pendant cette période de confinement, à la fois en termes d’impact d’activité, que de thèmes éditoriaux et de leviers de communication.
Quel impact de la crise sur l’activité social media ?
Le graphique ci-dessous mesure le taux d’activité agrégé sur chaque réseau social entre le 17 mars et le 24 avril 2019 et 2020. Si ces données masquent des disparités entre les différents acteurs, elles permettent de dessiner une tendance et de mesurer quel réseau a été le plus impacté par la crise.
Evolution du nombre de publications par réseau
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LinkedIn est le réseau qui enregistre la plus faible baisse d’activité entre 2019 et 2020 (- 12 %), suivi des Pages Facebook généralistes (- 41 %) et de Youtube (nombre de vidéos ayant été préparées en amont). En revanche, Twitter, réseau de flux et de forte activité éditoriale, a été significativement impacté (- 65 %). La chute est encore plus marquée pour les réseaux de valorisation de la marque employeur comme les comptes Twitter dédiés au recrutement (- 82 %) ou les comptes Instagram (- 70 %). La crise a en effet mise à mal la politique de recrutement des cabinets de conseil et d’audit, ce qui s’est traduit par un arrêt brutal de l’activité social media pour la plupart des cabinets, à l’exception notable de Mazars et KPMG.
Quels thèmes éditoriaux sur les réseaux sociaux ?
Plus de 500 tweets ont été publiés entre le 17 mars et le 24 avril, tous acteurs confondus. L’évolution du volume de tweets quotidien met en exergue deux phases principales : une première phase de ralentissement entre le 17 et le 26 mars, et une seconde phase de reprise d’activité avec une stabilisation du volume de tweets hebdomadaire.
Analyse de l’évolution des tweets postés par les 11 cabinets (données issues de Visibrain)
Cartographie des hashtags utilisés
La cartographie des hashtags utilisés permet de mettre en évidence les plus récurrents (taille proportionnelle), mais surtout leurs interconnexions. On constate ainsi que le hashtag #covid19 est au centre des hashtags, à partir duquel la plupart sont connectés. Les principales interactions (plus le lien est épais plus les interconnexions sont nombreuses), confirment donc que les thématiques les plus connectées sont la #cybersécurité et le #télétravail, mais aussi #Afrique (BearingPoint), et dans une moindre mesure la #banque et la #trésorerie. Les formats #webinar et #podcast sont les plus utilisés conjointement avec #covid19.
EY, KPMG et Deloitte sont les cabinets qui présentent la plus forte proportion de hashtags et mots-clés liés à la crise et à l’expertise. Leur ligne éditoriale Twitter a été principalement articulée autour de la gestion de crise. A contrario, d’autres acteurs se sont moins focalisés sur la crise, à l’instar de BearingPoint, qui a beaucoup communiqué sur le Podium de la Relation Client et le développement digital de l’Afrique. Wavestone s’est focalisé sur deux thématiques connexes à la crise : le télétravail de ses collaborateurs et la cybersécurité. Mazars, de son côté, a principalement communiqué sur sa politique de recrutement en temps de crise.
Principaux leviers de communication expertise
La mise en avant des contenus d’expertise liés aux impacts de la crise prend principalement trois formes, qui correspond aux trois missions d’un cabinet de conseil et d’audit en temps de crise : informer, conseiller et accompagner.
L’un des principaux défis rencontrés par les différents cabinets de conseil et d’audit a été de devoir faire preuve d’une grande réactivité pour apporter son éclairage et définir une offre d’accompagnement adaptée face la crise, tout en prenant le temps nécessaire à la production de contenus d’expertise à forte valeur ajoutée. Cette difficulté explique la période de latence observée notamment sur Twitter quelques jours après le confinement.
Le site Internet officiel, principale plateforme de contenus sur la crise
L’une des priorités des différents groupes analysés a été de repenser l’agencement des contenus sur les sites Internet, notamment sur la Home Page. L’enjeu était en effet de mettre en avant non seulement les contenus d’expertise et de décryptage, mais également l’offre d’accompagnement en cette période de crise. Quelle que soit l’architecture du site Internet, la plupart des cabinets ont su s’adapter en créant des rubriques ou des mini-sites dédiés. Un enjeu crucial pour ancrer l’expertise du cabinet dans le réel et rassurer à la fois les collaborateurs, les clients et prospects.
Parmi les cabinets analysés, Deloitte et KPMG ont créé des rubriques dédiées avec une ligne éditoriale équilibrée en termes de contenus entre actualités, décryptages, podcasts et Webinars. D’autres acteurs, comme Mazars et PwC, ont également produit de nombreux contenus mais ont mis davantage en avant leur offre d’accompagnement. EY, de son côté, a dans un souci de transparence, détaillé les mesures prises au sein du groupe. Cependant, certains cabinets comme BearingPoint et mc2i n’ont pas rééditorialisé leur site Internet ce qui nuit à la lisibilité des contenus sur la crise.
Le boom des Webinars
L’une des grandes tendances observées pendant le confinement est la production importante de Webinars de décryptage sur les impacts de la crise. Or, peu de cabinets de conseil et d’audit avaient jusqu’ici une production régulière en la matière. La crise a donc permis aux différents groupes de s’adapter et de privilégier ce format dynamique et interactif.
EY a été le cabinet plus prolifique en la matière et a lancé pas moins de 28 Webcasts sur l’impact de la crise dans différents secteurs d’activité (gouvernance, finance, droit social, droit du travail, droit des affaires, cybersécurité…). Une stratégie éditoriale similaire a été adoptée par KPMG et Deloitte, qui ont proposé une dizaine de Webinars. D’autres cabinets ont en revanche proposé des Webinars aux thématiques plus généralistes, comme Mazars, qui a entre autres misé sur l’optimisation des activités des entreprises à distance, ou PwC, dont les deux premiers Webinars traitaient de manière transversale des impacts de la crise sur différents secteurs d’activité.
Bien qu’en vogue, les podcasts ont été beaucoup moins utilisés, à l’exception notable de KPMG, premier cabinet de conseil et d’audit à avoir créé sa Webradio en 2014 (RADIO KPMG), et Deloitte, qui a lancé sa série de podcasts Covid Insights.
Les tribunes d’experts sur LinkedIn
Ces tribunes permettent d’incarner davantage la prise de parole de l’entreprise et offrent un format plus libre et plus souple qu’une tribune média ou qu’un insight de blog.
Sia Partners, EY, Wavestone, PwC et BearingPoint ont été parmi les plus actifs dans ce domaine. Sia Partners émerge particulièrement, non seulement par le volume de tribunes produites (14), mais également par la cohérence éditoriale et graphique avec l’utilisation de la bannière du mini-site Internet dédié à la crise et du hashtag #BeyondCovid19.
La marque employeur à l’épreuve de la crise
Même si de nombreux cabinets avaient d’ores et déjà développé une culture du télétravail, la crise a représenté un nouveau défi pour leur marque employeur, en mettant notamment à mal la politique de recrutement et d’onboarding.
Les cabinets qui ont poursuivi leur politique de recrutement pendant la crise ont su très vite réagir, en annonçant quelques jours après le début du confinement la mise en place de process de digitalisation (entretiens sur Skype…), comme KPMG et Mazars.
Par ailleurs, les contenus réseaux sociaux de stock dans ce domaine étant moins tributaires du contexte actuel, les groupes les mieux armés ont pu continuer de publier les contenus préparés en amont, tout en créant de nouveaux contenus dédiés à la crise.
Instagram ou les portraits des collaborateurs en confinement
Si l’activité a été fortement réduite sur Instagram, quelques cabinets, aux premiers rangs desquels BearingPoint, Wavestone et mc2i, ont maintenu leur activité notamment par des portraits de collaborateurs chez eux pendant le confinement. Le ton peut être sérieux (BearingPoint), ou décalé comme Wavestone. mc2i, de son côté, avec sa série de vidéos Game of Home, a proposé des vidéos de collaborateurs faisant part de leur confinement face caméra en répondant à des questions professionnelles et personnelles (conseils de livres, séries…). À noter que BearingPoint a proposé l’un des visuels les plus créatifs et impactants sur Instagram avec une photo collective adressant un message au personnel soignant et où chaque collaborateur est photographié avec une lettre.
Voir cette publication sur Instagram
EY, qui avait la ligne éditoriale la plus diversifiée des cabinets analysés sur Instagram, a misé principalement sur un événement, celui du Prix du meilleur projet associatif, maintenu malgré les circonstances. Les posts invitent les étudiants à y participer notamment via un décompte calendaire. Parallèlement, EY a également communiqué sur ses live en interne (stories) destinés aux stagiaires et impliquant les associés.
Twitter : Mazars réaffirme sa politique de recrutement
Malgré le confinement, Mazars a soutenu sa politique de recrutement et continué de communiquer de manière active sur les réseaux sociaux, principalement sur son compte Twitter Carrières (36 tweets publiés au cours de la période étudiée soit une moyenne de 0,9 tweet par jour). Mazars s’est rapidement adapté car dès le 19 mars, le compte a posté une vidéo annonçant la digitalisation des process de recrutement.
Outre les offres d’emplois, le cabinet a produit une grande diversité de contenus à destination des candidats : live chat et Webinars, portraits de collaborateurs, conseils pour les candidats, questionnaires… Cette stratégie de contenus véhicule l’image d’un cabinet dynamique qui continue son activité malgré la crise.
Facebook : KPMG s’adapte rapidement
À l’instar de Mazars, KPMG a réagi rapidement à la crise et a publié plusieurs messages sur l’adaptation de son processus de recrutement au contexte actuel. KPMG a ainsi organisé des sessions de recrutement 48h Khrono à distance, ou encore des live Chat avec des ambassadeurs du groupe.
Le maintien de l’activité marque employeur de KPMG tient en premier lieu à la diversité de sa ligne éditoriale et de la préparation en amont de nombreux contenus (présentations vidéo de métiers…), mais également à l’adaptation rapide de ses process en temps de crise.
Quels enseignements ?
Que la crise liée au Covid-19 soit un cygne noir ou pas, elle a, par sa brutalité, conduit les cabinets de conseil et d’audit à se mobiliser et à repenser leur communication digitale. Le déploiement de stratégies nouvelles fournit les clés pour une meilleure adaptabilité en cas de crise future. Quatre principaux enseignements peuvent être tirés de ce benchmark :
- Une priorité, la rééditorialisation des sites Internet : L’enjeu de ce réagencement des contenus était en effet de mettre en avant non seulement les contenus d’expertise et de décryptage, mais également l’offre d’accompagnement en cette période de crise.
- Le boom des Webcasts / Webinars : L’une des grandes tendances observées pendant le confinement est la production importante de Webinars de décryptage sur les impacts de la crise. La crise a donc permis aux différents groupes de s’adapter et de privilégier ce format dynamique et interactif. En revanche, le podcast a été moins utilisé.
- Une période de latence pour les contenus expertise : En moyenne, sur l’ensemble des cabinets analysés, on note une latence allant d’une semaine à 10 jours pour la publication de nouveaux contenus expertise sur les différents réseaux sociaux. Cette latence ne s’explique pas tant par des raisons logistiques et organisationnelles, que par la nécessité de prendre suffisamment de recul pour produire des contenus à forte valeur ajoutée.
- Une latence moins visible pour les contenus marque employeur : Les cabinets qui ont poursuivi leur politique de recrutement pendant la crise ont su très vite réagir, en annonçant quelques jours après le début du confinement la mise en place de process de digitalisation, comme KPMG et Mazars.
Au-delà de la période de crise et de l’immédiat après-crise, la question est de savoir quel impact aura cette période sur la communication digitale des cabinets de conseil et d’audit de demain. Va-t-elle modifier la ligne éditoriale ou les formats de contenus, par la production régulière de podcasts/Webcasts, ou par un renforcement de la communication autour de la marque employeur ? Ou n’aura-elle qu’un effet passager qui va se traduire par un « retour à la normal » et une communication balisée ?
*Covid-19 : Baromètre marques et marketeurs en temps de crise – Part I – Union des Marques – 20 avril 2020.
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